Regards croisés / La négociation

À l’occasion de la publication de leur livre Négocier plus, Négocier mieux et des 15 ans du Salon des micro-entreprises, les éditions Dunod ont réalisé une interview croisée de Frédéric Vendeuvre et Éric De Cozar.

FRÉDÉRIC VENDEUVRE, consultant, co-fondateur de HALIFAX consulting et ÉRIC DE COZAR, Président de DIAGEO France, partagent leur expérience d’experts.

Mener une négociation est pour un commercial un moment qui peut être source de tension. Il faut en comprendre toutes les étapes afin de mieux la préparer, l’appréhender et la vivre. L’objectif est alors de réduire le stress avant et pendant la négociation pour être plus efficace !

Quand peut-on dire d’une négociation qu’elle est efficace ?
Éric De Cozar : Une négociation ne s’évalue pas au moment de l’accord ou de la rédaction du contrat, elle s’apprécie à l’aune des résultats qu’elle aura produits.
Si la valeur créée pour chacune des parties s’avère satisfaisante dans le temps et si chacun y trouve son compte, alors on pourra considérer la négociation comme réussie.
Le meilleur indicateur de réussite est le niveau de confiance entre les parties et la volonté de construire ensemble au moment de démarrer la suivante.
Frédéric Vendeuvre : Tout à fait d’accord, une des difficultés est de fixer la perspective de temps que l’on se donne pour évaluer son impact positif.
Comme sur beaucoup de sujets, on a tendance à ne s’intéresser qu’au très court terme et à l’immédiat. La plupart des systèmes variables pour les commerciaux encouragent d’ailleurs cette myopie.

Quels sont les points clés d’une négociation efficace ?
Éric De Cozar : Toutes les étapes sont importantes dans la gestion d’une négociation mais on peut isoler deux phases essentielles :
La préparation est indispensable pour garder le contrôle, anticiper et éviter au maximum les situations imprévues et déstabilisantes. Aussi, connaître les enjeux et le contexte de l’autre partie permet de mieux comprendre ses intérêts et de pouvoir y répondre sans compromettre ses propres objectifs.
L’improvisation est l’ennemi d’un bon négociateur.
La formalisation du deal est également capitale. Beaucoup de choses se jouent au moment de la rédaction d’un accord, chaque mot compte et la rigueur s’impose pour éviter malentendus et déceptions.
Frédéric Vendeuvre : J’en rajouterai une troisième, sorte de préalable à la négociation : c’est de négocier la façon dont on devra négocier ; une pré-négociation permettant soit de simplifier, soit de cadrer la négociation à venir.
De jauger aussi comment les deux parties entendent négocier. On peut donc considérer que pour un commercial, il est en phase de pré-négociation dès les premiers contacts avec son prospect.

En temps de crise, faut-il utiliser d’autres outils ?
Éric De Cozar :
Les enjeux prennent le pas sur la relation, la gestion des tensions est plus importante. Par ailleurs, certaines règles tacites peuvent être remises en cause. Le respect des engagements peut souffrir de la nécessité absolue d’aboutir. Un « oui » n’a plus forcément la même valeur en temps de crise. La formalisation de l’accord est plus que jamais essentielle.
Enfin, Il faut également faire preuve de plus de créativité. La raréfaction des sources de croissance oblige à être inventif pour générer des options susceptibles de créer de la valeur.
Frédéric Vendeuvre : Parfaitement d’accord, chez Halifax Consulting nous faisons beaucoup de coaching de négociation dans des métiers très divers et ce sont des points récurrents.

Vos conseils pour améliorer la performance d’une négociation ?
Éric De Cozar et Frédéric Vendeuvre : Sans dévoiler notre livre, on peut ici ensemble donner nos meilleurs conseils.
Rien ne remplace l’expérience, le vécu, le fait de vivre des situations différentes, le fait de s’entraîner.

Si on devait en distinguer cinq, on dirait :

  • PRÉPARER : connaitre son sujet, recueillir de l’information, la traiter et
    l’exploiter.
  • ÊTRE CRÉATIF : multiplier les options, offrir des solutions, élargir le champ des possibles. Oublier ce que l’on croit.
  • SE DONNER DU CHAMP : prévoir une marge entre son objectif réel et sa position de départ, se donner du temps aussi pour négocier.
  • RESTER SOBRE : séparer l’objet de la négociation de la personne, repositionner les attaques personnelles sur l’objet de la négociation, se montrer respectueux.
  • RESTER FOCALISÉ : ce n’est pas celui qui gagne la discussion qui gagne  la négociation. On peut inviter à la critique, faire preuve d’empathie, recueillir de l’information par une écoute active, sans jamais perdre de vue ses propres intérêts et objectifs.